Jeudi 28 septembre 2017 : Conférence « Intégrer le marketing à la médiation culturelle : un nouveau modèle d’archivistique moderne » par Martine Cardin

Conférence organisée dans le cadre de la séance

DE LA MEDIATION A LA NEGOCIATION

Président de séance : Julien OLEZYC, Directeur adjoint des Archives municipales d’Amiens (80).

Présentation des contributeurs :

Martine Cardin est professeure titulaire au Département des sciences historiques de l’Université Laval, où elle enseigne depuis 1988 et assure la direction des programmes d’archivistique. Parmi ses recherches, mentionnons un projet de mise en valeur d’archives orales numériques sur la Ville de Québec. Elle a été également co-chercheuse du groupe InterPARES2 et a dirigé son équipe sur la production et la maintenance des documents d’archives. Depuis quelques années, elle s’intéresse aux modalités d’exploitation documentaire à l’ère numérique et à leurs impacts sur la gouvernance des systèmes d’archives. C’est dans cette optique qu’elle s’intéresse actuellement à la valorisation et à la conservation des archives québécoises de la publicité.

Christian Desîlets est professeur agrégé au Département d’information et de communication de l’Université Laval où, depuis 2006, il enseigne la publicité sociale. Spécialiste de la mise en marché des causes sociales, ses recherches se situent à l’intersection de la sociologie de l’action publique et de la communication marketing. Elles portent notamment sur la manière dont les promoteurs de causes sociales représentent au public les problèmes sociaux et publics dont ils s’occupent, et sur les stratégies de réception par lesquelles leurs différents publics traitent les messages qui cherchent à les influencer. Auparavant, il a travaillé dans les secteurs public et privé, et notamment au sein de Cossette communication-marketing dont il a été le vice-président
directeur général du bureau de Québec.

À l’heure actuelle, les archives dorment dans des dépôts où elles sont largement sous-exploitées. Le paradoxe est que l’on dépense des sommes colossales dans leur conservation à long terme sans pour autant consentir des investissements conséquents dans leur valorisation. De fait, bien que la valeur d’existence des archives ne soit plus à démontrer, leur valeur économique n’est pas évidente à saisir. Les producteurs et la société en général se privent d’une ressource extrêmement riche pour supporter leur gouvernance, favoriser le développement et la circulation de leurs connaissances ou participer à la construction des représentations fondatrices de leur identité culturelle. D’un point de vue durable, le problème est qu’on arrive difficilement à recycler et réinsérer les archives dans les structures d’activités de la société. La difficulté semble tenir plus à une mauvaise mise en marché des documents auprès des clientèles d’usagers qu’à la reconnaissance de leurs valeurs. Traditionnellement la tendance a été de s’attacher à valoriser les archives pour elles-mêmes sans se soucier de leurs usages. Or, le modèle marketing inverse cette perspective et invite à penser la mise en valeur des archives en fonction des besoins qu’elles peuvent satisfaire. Cette communication présente les grandes lignes du projet MÉDIAS actuellement conduit à
l’Université Laval sous la direction des professeurs Martine Cardin et Christian Desîlets.
MÉDIAS est un projet de médiation culturelle dédié au développement des principes de
l’archivistique participative en prenant pour objet d’expérimentation les archives de la publicité. MÉDIAS assoit à une même table des chercheurs, des étudiants, des institutions gardiennes d’archives et leurs usagers ainsi que des représentants de l’industrie du monde publicitaire et des TI. Ensemble, ils développent des stratégies de valorisation orientées usagers plutôt que document. Ils mettent l’emphase sur l’insertion des archives dans les schèmes de pratiques de leurs utilisateurs plutôt que sur la description des documents. Ils s’intéressent aux modalités par lesquelles il est possible d’associer les chercheurs à la valorisation de leur sources tout en balisant leurs droits et pratiques d’accès. MÉDIAS entend ainsi concevoir les cadres théoriques et pratiques d’une archivistique participative apte à intégrer l’input de l’usager à toute la chaine de
production de valeur (contextes de production/exploitation) des documents.

Mercredi 27 septembre 2017 : Conférence « Repenser la salle de lecture » par Jean-Yves de Lépinay

Conférence organisée dans le cadre de la séance

ACCOMPAGNER, SENSIBILISER, ACCUEILLIR

Président de séance : Anne-Sophie HONNET, Responsable service Archives de la Communauté d’agglomération Paris-Vallée de la Marne, des archives municipales de Pontault-Combault et de Roissie-en-Brie (77).

Jean-Yves de Lépinay est enseignant, documentaliste et programmateur indépendant. Après des études de sciences économiques et un diplôme de documentaliste à l’INTD (Cnam), il s’est spécialisé dans l’audiovisuel et le cinéma. Il a été près de vingt ans Directeur des programmes au Forum des images, dont il a coordonné la programmation des salles de projection , la constitution et la valorisation des collections. Il est aussi président de l’association P.I.A.F.(www.piafimages.org), qui regroupe responsables de fonds audiovisuels et documentalistes, et de l’association Images en bibliothèques (www.imagesenbibliotheques.fr), qui oeuvre pour la mise en valeur des collections cinématographiques et audiovisuelles dans les bibliothèques publiques. Il a publié de nombreux articles sur la documentation audiovisuelle et sur le cinéma, dans diverses revues et ouvrages collectifs.

Salles de lecture, espaces de consultation : quels espaces de médiation ?

Le temps est, dit-on, à la « désintermédiation ».Ce terme, à l’origine employé dans le secteur bancaire et dans le monde du marketing, apparaît aujourd’hui dans nos univers pour rendre compte de la façon dont les usagers peuvent aujourd’hui de plus en plus accéder aux informations – et également aux archives elles-mêmes – en évitant les intermédiaires. La dématérialisation ouvre cette voie comme elle l’a ouverte dans d’autres secteurs, bousculant les professions de médiateurs – que ce soit les employés de banque, les commerçants, les journalistes ou même les enseignants.

Ce que l’on appelle « Open Data », facilitant éventuellement les accès directs, est aussi l’occasion d’une possible « ré-intermédiation » par un secteur commercial qui va se saisir des données ouvertes pour les revendre, traitées et mises en forme. Rien n’interdit d’imaginer pour demain un « Über » de la documentation et des archives.

Si les documents, les œuvres, sont dématérialisées, et accessibles directement sur les réseaux à travers des outils de recherche et des systèmes de visualisation de données performants, à quoi servent nos espaces de consultation, nos salles de lecture de bibliothèques ? Ont-elles encore une fonction nécessaire, au-delà de pouvoir accueillir, bien au chaud, des usagers du réseau qui utilisent l’accès WiFi et les prises électriques pour recharger leurs smartphones ?

Ces évolutions, qui touchent tous les secteurs d’activité, sont particulièrement avancées dans le domaine de l’audiovisuel. Ainsi, la salle des collections du Forum des images, à Paris, qui fut sans doute la première au monde, à la fin des années 80 à proposer à tous les publics la consultation sur place d’une collection d’archives audiovisuelles, est en voie de fermeture définitive.

Cette situation est-elle inévitable ? Peut-on imaginer des espaces de médiation nouveaux, autour d’autres fonctions que le seul accès individuel à des documents physiques, et articulés avec les services en ligne ?